Le testament du porte-clés

Après avoir trois fois dit : "Je ne le connais pas".
Il entendit chanter le coq en pleine nuit.
Son sang ne fit qu'un tour et il se rappela
Que Jésus avait dit : "Ce soir tu me renies".

Quand il leva les yeux vers ceux du supplicié,
Il ne vit que douceur, pardon, miséricorde.
Mais l'homme et son orgueil n'ont pas su voir la paix
Que lui promettais Dieu malgré toutes les discordes.

Il ne pensait qu'à ça, ce cri dans les ténèbres
Ce cocorico-là qui résonne plus fort.
Sa fierté est blessée, sa honte le désespère
Et rien ne peut calmer l'angoisse et le remords.

Il faut les tuer tous ces coqs de basse-cours
Qui troublent le sommeil des hommes de ce temps.
Il faut éradiquer cette race, toujours,
Pour qu'il n'y est plus jamais de nuit de reniement.

Ce fut le testament de Pierre avant sa mort
Il jeta sur les "Pierres" qui naîtront après lui,
La mission de tuer et de tuer encore
Tous les coqs et volailles qui crient en pleine nuit.

Tous les Pierres ont depuis chassé les poulets gris,
Aux plumes vertes ou roses, ceux aux cous déplumés,
Aux pattes de velours, aux griffes acérées,
Tout ceux qui chantent ou crient quand le soir se fait nuit.

Et notre Pierre a su avec grand dévouement
S'acquitter de sa tâche en tuant et cuisant.
La sauce portugaise accommode à merveille
Même si c'est cramé ou mal cuit de la veille.

C'est ainsi que depuis, quand Pierre voit un coq,
Un poulet qui demain pourrait chanter trop tôt,
Il sort son grand couteau, son tablier de cuistot
La grille et le charbon qu'il a toujours en stock.

Quand il faut quatre sous pour faire n'importe quoi
La solution toujours s'impose très à l'aise:
Faire cuire des poulets à la sauce portugaise
Et en voilà encore qui ne chanterons pas.

Il est d'ailleurs, je crois le maître incontesté
Des tueurs de volaille, des cuiseurs de poulets.
Saint Pierre tout là-haut est très content de lui
Car il a su calmer l'angoisse qui le suit.

Je terminerai-là ce testament de choc,
Cette audacieuse vue d'un épisode noir.
Mais attention, ce soir cachez bien tous vos coqs,
Je n'hésiterai pas à faire mon devoir.

            Pierre Autaa.